jeudi 2 décembre 2010

I LOVE YOUR DIAMOND SHAPED TATTOO. THANKS IT'S MY ENGAGEMENT RING

Je vais vous avouer quelque chose. Quand je fais une interview, je prépare toujours beaucoup trop de questions que celles que je pourrai poser au regard du temps qu'il m'est imparti, par stress, par peur que l'artiste n'ait rien à dire, ne réponde à côté, ne capte pas où je veuille en venir. Ce qui fait que je me retrouve régulièrement avec une quantité astronomique de questions, et autant de réponses, à dérusher, avant d'élaguer le tout: des réponses trop longues en passant par les questions bancales. Dans un souci de transparence (wikileaks syndrome) -et pas du tout par flemme d'écrire de nouveaux articles- je vous propose donc la version UNCENSORED de mes interviews. 



                    Sleigh Bells @ Point Éphémère, 2010 (© Anh Phi


À l'occasion du concert parisien de Sleigh Bells, au Point Éphémère, j'ai pu constater de la puissance de la noise pop du groupe en live. Un show fait de sueur, de cris, de stroboscope, où les riffs de guitare contrastaient à merveille avec la voix suave d'Alexis Krauss, la chanteuse. Cette bête de scène se révèle être d'une douceur infinie à la ville. 


Comment un serveur, ex-membre d'un groupe hardcore (Poison The Well) rencontre une ex-membre d'un groupe de pop adolescente (Rubyblue) devenu enseignante ?

On s'est rencontré à Brooklyn, Derek venait d'arriver de Floride afin de travailler sur sa musique et de trouver la voix qui collaborerait à son projet. À l'époque, j'enseignais à plein temps, je continuais à chanter professionnellement pour les fans, à faire des sessions avec des paroliers, faire des démos mais rien de plus. Un jour, avec ma mère, nous sommes allées dîner dans le restaurant où Derek travaillait. Il était notre serveur, ma mère étant très bavarde, elle lui a posé plein de questions. Il s'est trouvé qu'il venait de Floride, tout comme elle. Elle a donc voulu savoir ce qui l'avait amené ici. Il lui a expliqué qu'il travaillait dans la musique, aussitôt elle lui a dit que j'étais chanteuse, j'étais tellement gênée, je priais pour qu'elle se taise en levant les yeux au ciel mais cela a intéressé Derek. Je lui ai donc expliqué que je chantais depuis toujours aussi il m'a proposé de lui donner mon email pour qu'on se revoit et qu'il me fasse écouter ce qu'il composait. Comme je sentais qu'il ne me draguait pas et qu'on allait réellement parler musique, je lui ai donné. On ne vivait qu'à trois blocs d'écarts, du coup on s'est revu rapidement, il m'a fait écouté ses compositions sur sa guitare et j'ai adoré. J'étais très enthousiasmée par son projet, je n'avais jamais rien entendu de pareil auparavant. On a commencé à enregistrer et on aimait vraiment ce qu'on faisait, cela sonnait juste, donc on a persévéré dans cette voie. Ensuite, je suis retournée enseigner, j'ai fini l'année scolaire et j'ai décidé de travailler à plein temps avec lui. On a commencé à faire des concerts en septembre 2009. On a eu beaucoup de chance, on a joué sur plein de lines-up géniaux et les gens on eu l'air d'apprécier très rapidement ce qui nous a permis de continuer et nous voilà aujourd'hui !


Comme vous ne vous connaissiez pas depuis longtemps, cela n'a pas été difficile de travailler ensemble? Il y a -t-il eu des quiproquos, des malentendus?

C'était étonnamment simple et je pense que c'est pour ça que l'on a continué. Derek avait une idée très claire de ce qu'il voulait, on en a discuté, je comprenais ce qu'il voulait, il aimait ce que j'étais capable de faire, créativement on était sur la même longueur d'ondes depuis le début, on a jamais dû se battre sur quoique ce soit. Je pense que c'est pour cela que tout a été possible, car comme je l'ai dit auparavant j'enseignai, chose que j'adorais, et pour l'abandonner il fallait vraiment que je crois au potentiel de notre projet. Pas d'engueulade, de stress, juste du fun! 


Vous venez d'horizons musicaux complètement opposés, comment avez-vous réussi à les concilier ?

C'est amusant, tout le monde catalogue Derek dans la case hardcore à cause de son groupe, alors qu'en réalité il écoutait beaucoup de pop. À l'inverse de moi qui préférais écouter des trucs plus forts. Donc même si on jouait de la musique dans des genres tout à fait opposés, nous avions les mêmes influences. Nous sommes des gros fans de la Motown, de la soul, des groupes féminins des années 60 comme The Supremes, après on est aussi fan de punk rock classique que ce soit les Ramones ou les Clash. En réalité, on est des fans de pop mais également de sons plus lourds, ce qui a fait que ça a marché entre nous, on savait d'où on venait et où on voulait aller. Au final, Derek et moi ne parlons pas tant que ça de musique, on en parle mais de manière abstraite des sensations qu'elle nous procure. Par exemple, quand on enregistre, si on veut parler de ce qu'on veut vocalement on va dire "ça a besoin de pétiller ou de briller davantage, que ce soit plus doux ou plus rêche", c'est assez vague finalement. On ne dira jamais "je veux que ça ressemble à tel ou tel groupe" mais "je veux que l'on ressente ça". En tant que chanteuse, je le vois comme un jeu d'actrice, je mets vocalement dans la peau de ses divers personnages afin d'avoir un état d'esprit différent à chaque chanson. Une chanson comme Rill Rill est complètement différente d'Infinity Guitars et c'est ça que j'adore : devenir une personne différente sur chaque chanson.


Comment avez-vous enregistré l'album ? 

On a commencé à enregistrer des démos en septembre 2009. Les enregistrements se faisaient sur des choses que Derek avait travaillées depuis des années et comme je travaillais encore à plein temps, c'est également lui qui faisait une grande partie de l'écriture. Puis nous avons passé deux mois au Treefort Studio avec Shane Stoneback pour ingé son. C'est réellement un travail d'amour, qui n'appartient qu'à nous trois. C'est Derek qui a écrit et composé l'essentiel de la musique, ensemble on a davantage travaillé sur les mélodies et les harmonies, sur des chansons comme Riot Rhythm, Tell Them ou encore Run the Heart. Mais c'est sûr que notre prochain album sera beaucoup plus collaboratif. C'est amusant, parce qu'auparavant, je n'avais jamais travaillé dans la musique. Je veux dire j'étais chanteuse mais je n'écrivais aucun de mes textes donc quand on a commencé à travailler ensemble (avec Derek) ça m'a paru normal de ne pas participer à l'écriture. Maintenant c'est différent, je me sens beaucoup plus investie, il s'agit de ma musique à présent.


L'histoire veut que ce soit Spike Jonze qui vous ait découvert et introduit auprès de M.I.A, racontez-nous un peu.

Une amie à nous écrivait pour le blog de Spike Jonze pour le film Where The Wild Things Are, et elle est la première à avoir écrit sur nous. On n'avait que quelques chansons sur Myspace à l'époque. Ensuite, Spike a lu son blog (rires) et il a apprécié notre musique et l'a fait écouter à M.I.A, qui nous a aimé également et avec la spontanéité qu'on lui connaît elle nous a immédiatement contacté, a pris un vol pour New-York, Derek a travaillé sur la production de son dernier album et on a signé sur son label (N.E.E.T. Recordings, ndlr) en partenariat avec notre autre label, Mom + Pop Records, ce fut un enchaînement d'événements surréalistes !


Comment s'est passée votre collaboration avec M.I.A, elle qui est connue pour son extravagance, est-elle également ainsi professionnellement?

M.I.A comme beaucoup d'icônes pop est vue comme beaucoup plus impressionnante qu'elle ne l'est en réalité. Personnellement je la trouve très douce et terre à terre mais ses idées et son ambition sont énormes.


En France, on vous décrit souvent comme un mélange des Ting Tings et Crystal Castles, qu'en pensez-vous ? Comment prenez-vous cette comparaison ?

Derek et moi sommes de grands fans de Crystal Castles, si on nous compare à eux c'est sûrement par rapport à une certaine forme de brutalité qui nous est commune, bien que la voix d'Alice Glass et la mienne soient complètement différentes. D'ailleurs, leur travail de production est magnifique. Pour ce qui est des Ting Tings, c'est sans doute pour le côté plus pop et doux que revêtent certaines chansons, donc oui cela fait sens. Même si c'est toujours étrange pour nous de se voir comparer à d'autres groupes.


Pouvez-vous nous parler un peu de l'artwork de Treats, où l'on peut voir des pompoms girls aux visages déformés, fondus pour ainsi dire ?  

Sleigh Bells - Treats


Les photos de la pochette d'album viennent du yearbook de lycée de la mère de Derek qui datent des années 60. C'est une imagerie américaine on ne peut plus classique, mais à la douceur des pompoms girls se mêle le côté dérangeant de leur absence de visages. Cela reflète bien notre musique, on fait de la pop comme je l'ai dit précédemment mais avec quelque chose de très noir dedans. On aime jouer entre le léger et le lourd, le dur et le doux. Notre album essaie simplement d'illustrer cette alchimie.  


Un clip de fan a été réalisé avec la chanson "Riot Rhythm", l'avez-vous vu? Qu'en avez-vous pensé? Cette initiative vous a-t-elle plu?

Sleigh Bells "Riot Rhythm" from Bo Mirosseni on Vimeo.

Bo, le réalisateur, nous a emailé la vidéo, c'est hallucinant il a juste crée cette vidéo avec ses propres moyens. Il nous a proposé d'en faire le clip officiel de Riot Rhythm, le problème c'était que Derek et moi avions une autre idée depuis longtemps, on a donc dû refuser en lui souhaitant quand même bonne chance! Et ça a bien marché, sa vidéo à fait le tour des blogs, c'est génial, en plus ça nous fait de la pub à l'oeil (rires). C'est une vidéo intelligente et marrante, il a fait du bon boulot.


Vous aimez la tournée?

Oui, bien sûr c'est fatiguant, mais on en est encore au début pour nous: de plus en plus de monde nous découvre c'est encore très excitant, très frais.

Vous semblez très douce, presque timide, alors que sur scène vous êtes limite bestiale, quel est le secret de ce dédoublement de personnalité ?

J'ai toujours pensé que si la musique te prend vraiment aux tripes, qu'elle est puissante et entraînante, j'aurais l'air vraiment ridicule si j'étais là à chantonner calmement dans mon coin, je serais d'un ennui ! Si j'étais vraiment moi, je baisserais sûrement les yeux aussi, mais ça n'aurait aucun sens, donc j'ai dû me forcer à perdre mes inhibitions et me laisser transporter par la musique. Cela te permet de ne plus penser à ce que les gens vont penser de toi et d'être sans doute plus intéressante que si tu avais vraiment conscience de ce que tu fais. Quand je vais à un concert, je veux voir autre chose que l'album que j'ai chez moi, je veux expérimenter quelque chose, je veux danser, m'amuser et c'est ce que nous voulons que les gens ressentent à nos concerts. On veut qu'ils aient chaud, qu'ils transpirent, qu'ils ressentent vraiment quelque chose, pas qu'ils soient juste contemplatifs, on veut qu'ils soient actifs.


Vous sentez une réelle différence entre le public français et américain ?

Notre dernier concert en France a été extraordinaire, très drôle, les jeunes étaient tous torses nus en train de danser. On a un avantage aux États-Unis, c'est que les gens nous connaissent mieux alors qu'ici ils viennent plus pour nous tester, ils ne sont pas forcément fans à l'avance. Donc nos concerts aux US sont peut-être plus dynamiques même si on n'a pas à se plaindre des deux côtés de l'Atlantique. On a pas encore fait beaucoup de shows en Europe, on doit encore gagner notre crédibilité, on croise les doigts !


Vous vous êtes rencontrés à Brooklyn avec Derek, le quartier de la hype musicale par excellence, est-ce que vous êtes d'accord? Vous considérez-vous comme hype ou pensez-vous être considérés comme tel? 

Brooklyn est devenu l'un de ses endroits où il y a une multitude de gens créatifs et talentueux dans un espace très concentré, donc c'est très simple de rencontrer des musiciens, ce qui facilite la création de groupes. En ce qui nous concerne, on n'est pas vraiment un groupe de Brooklyn, ça a été notre point de rencontre mais ça n'a jamais eu une influence majeure sur notre musique. De même façon on n'y a très peu joué, mais il est vrai que beaucoup de personnes nous associent à ce lieu. Pour ce qui est de la hype, on a eu beaucoup d'attention très vite ce qui fait que beaucoup de personnes sont très sceptiques quant à notre capacité à durer, ils nous voient comme un "one hit band", ceux qui font le buzz maintenant mais dont on ne parlera plus dans six mois. Je crois qu'on est en train de leur prouver qu'ils ont tort. Avant la sortie de l'album, les gens n'arrêtaient pas dire "leur album va être mauvais" alors qu'au final on n'a eu que de bons échos. Ce n'est pas parce qu'on nous a présenté ou connu comme un buzz band qu'on n'est pas là pour durer et faire de nombreux albums qui plairont aux gens, ou du moins c'est ce que je souhaite !


Quels sont vos projets à venir ?

Nous sommes en tournée jusqu'à la fin de l'été prochain, il nous reste encore plein d'endroits à découvrir. Nous allons en Australie, au Japon puis à nouveau en Europe avant d'aller à la conquête de nombreuses villes aux États-Unis au printemps. Donc finalement, il s'agira de présenter notre album au plus de monde possible avant de retourner et d'en enregistrer un nouveau. On a l'impression que cela fait depuis toujours que l'on joue, notre album étant court, 32 minutes, on s'en lasse rapidement, donc on a hâte d'entrer à nouveau en studio pour enregistrer de nouvelles choses.


BONUS:

SLEIGH BELLS "Infinity Guitars" live in Paris / Point Éphémère 

mercredi 1 décembre 2010

JE VIENS DE COMPOSER UNE PUTAIN D'INTRO

Par un samedi ensoleillé et quelques heures avant leur concert à la Flèche d'Or, je rencontre les deux zoulous du groupe d'électro-pop/rock Call Me Senor à la terrasse d'un café. Sur leur 1er EP, Oh La La, on sentait déjà toute l'énergie d'Alex (à la guitare) et JB (au chant), il en est de même IRL, jugez plutôt.


Call Me Senor @ La Flèche D'or, le 27 novembre 2010. (copyright Anh Phi)

La musique à l'origine c'est pour choper des filles ou ça a toujours fait partie de vos vies?

Alex: Je chopais plus de filles avant de faire de la musique.
JB: La même, on avait plus de temps pour choper des filles avant. On a toujours écouté énormément de musique et au bout d'un moment tu te poses la question si ça serait intéressant d'en faire, de passer le cap. T'es fan de musique, t'as des posters dans ta chambre et tu te dis tiens ça serait cool d'essayer d'en faire.  
Alex: Pour certains c'est leurs parents qui les poussent alors que nous c'est venu de nous même, instinctivement on n'a pas essayé de reprendre d'autres groupes, on a appris seul à composer chacun de notre côté.  


Avant Call Me Senor, vous faisiez partie de The Victorians, de 2004 à 2007, pile au moment de l'effervescence autour du "renouveau de la scène rock française", vous en gardez quel souvenir?

JB: Nous on était plus en retrait, de par notre son, il y avait beaucoup de trucs qui sonnaient très Libertines, très Strokes, on l'était un peu, parce que c'était dans l'air du temps, clairement on a tous été inspiré par ça, mais avec The Victorians, au fur et à mesure, on est parti sur un délire un peu brit-pop, gros fan d'Oasis, de Blur, de choses comme ça, donc on était à la fois dans le truc et en décalage par rapport aux autres.  
Alex: Après sur le phénomène, évidemment nous ça nous dérangeait un peu d'être associés tout de suite à des groupes qui ne faisaient pas du tout le même style de musique. Mais on ne peut pas nier que ça a créé un engouement et que ça nous a permis d'aller jouer en Angleterre, ce qui ne se serait jamais passé autrement. C'était grâce à cette effervescence que certains groupes ont eu la chance d'aller en Angleterre, d'avoir des documentaires sur eux etc. C'est dur de s'en plaindre, quand ça t'amène ce genre de chose. Mais c'est vrai que c'était un peu horrible ces soirées "Passe ton Bac", nous on l'avait déjà eu depuis un moment, ça faisait un décalage. En plus, on n'avait pas le même son, nous on cherchait plus, déjà, la mélodie, ce qu'on a continué avec Call me senor et ce qu'on a perfectionné dans ce groupe là, alors que les autres c'était plutôt la rage, balancer 2/3 accords bien et l'énergie, être sur scène quoi.  


J'ai cru comprendre que vous n'aimiez pas qu'on vous parle de "scène parisienne", vous pouvez m'expliquer pourquoi?

JB: Pour moi, c'est parce que la scène parisienne n'est pas particulièrement excitante en ce moment.
Alex: Ça dépend à quelle période tu fais référence. 
JB: Ouais, mais là, à Paris, il y a peut être un ou deux groupes capables de nous exciter... 
Alex: Et on joue avec eux ce soir! (Sourya et Neimo, ndlr)
JB: Et on joue avec eux ce soir ouais, mais sinon ce n'est pas un truc excitant, on a clairement pas envie de s'ancrer dans un mouvement qui n'est pas forcément celui qui nous plaît et qui est un peu endormi en ce moment. Certes, on est très parisien en ce moment, sur nos concerts, notre son, parce que de toute façon ce qui nous nourrit c'est cette ville, au moins en partie. On est dans une période Paris, mais à termes on va essayer de jouer un maximum à l'étranger. C'est l'objectif, notamment pour 2011.  
Alex: Le truc c'est que quand tu es associé à un courant, c'est facile de faire des généralités, de dire: "de toute façon ça c'est passé, ça c'est nul, ils ne se réinventent pas, ils font la même chose". L'autre truc c'est des articles lus et des débats dans Rock'n'Folk & co: ils prennent un groupe au hasard, à l'époque dont on parlait ils ont pris les Naast, ils ont tapé dessus comme des malades et maintenant ils disent "ouais peut être que c'était pas si mal, on n'aurait pas dû y aller aussi fort sur eux". C'est un peu abusé de faire des courants, d'en choisir un de le mettre en égérie puis le taper dessus jusqu'à ce qu'ils arrêtent la musique. Les Naast c'étaient des gamins à l'époque, ils avaient quoi, 17 ans? C'est pas cool de faire ça. Donc nous on préfère se différencier dès le départ.


JB tu disais que la scène parisienne n'est pas très excitante en ce moment, pour vous quelle scène, aujourd'hui, l'est?

Alex: Pas Londres en tout cas... Ça doit être L.A, mais ça fait chier! 
JB: Non mais par exemple à New-York récemment il y a des trucs assez cool… 
Alex: Ça c'est pas mal essoufflé depuis 2007 quoi, à l'époque t'avais 30 groupes qui étaient tous bons et après t'aimais ou t'aimais moins, maintenant c'est un peu dur, il y a 10 albums, il y en a 2 que tu écoutes en entier quoi. 
JB: Il reste des trucs comme le rappeur Das Racist qui me fait marrer, il fait partie de Boy Crisis, c'est des trucs qui m'amusent et qui me branchent.
Alex: Y'a les Raveonettes aussi, qui sont quoi Suédois, Norvégiens? (Danois, ndlr) 
JB: Y'a pas vraiment de ville qui nous branche en particulier, peut-être que ce sera Paris avec une prochaine scène, je ne sais pas.  


Vous êtes un groupe parisien, français, alors pourquoi chanter en anglais?

JB: Parce que justement on est français, parisien et tout, mais c'est un moyen de rejeter ce truc de Paris et pas spécialement s'inscrire là dedans. On veut bien, à la rigueur, à l'étranger être considéré comme français, ça devient un peu marrant, ça te donne un petit exotisme.
Alex: Comme on est surtout distribué sur le label Shakermaker, qui est un label digital, c'est juste dommage de se limiter à la France, la Belgique, la Suisse, le Luxembourg, ça fait léger quoi. 
JB: L'Angleterre c'est un truc qui nous fait vibrer et auquel on aimerait s'attaquer
Alex: Ça nous permet de travailler à avoir des textes écoutables et lisibles, davantage que le groupe parisien qui va juste faire un best of des paroles d'Iggy Pop, des Beatles ou des Stones, avec les mêmes rimes tout le temps, où tu es capable de finir la phrase d'après la rime précédente, alors même que c'est la première fois que tu écoutes la chanson. Comme ça on pourra passer pour un groupe non parisien, peut-être.  


Call Me Senor ça vient d'où, c'est un trip entre vous ou il y a une vraie explication derrière?

Alex: C'est un trip entre nous, on a fait ça ensemble, on a trippé sur cinq noms assez cons, et on a choisi celui là. Notamment parce que tu as deux mots anglais, un mot en espagnol, ça allait bien avec notre idée de brouiller les pistes.


Niveau composition ça se passe comment?

Alex: Soit on fait tout ensemble tous les deux, soit, ce qui s'est plus passé ses derniers temps: JB écrit une chanson ou je l'écris et après on se la passe à l'autre. 
JB: Ou alors on la termine à deux pour être sûr d'être d'accord sur tout. 
Alex: On a fait partie d'un groupe avant les Victorians, donc ça fait sept, huit ans qu'on est dans les mêmes groupes
JB: qu'on fait de la musique ensemble, on se connaît à mort. Et l'intérêt, vu qu'on est que deux, c'est qu'on va super vite. Le filtre pour les chansons c'est juste qu'elles plaisent aux deux et dans ce cas là on passe direct à l'étape suivante.  
Alex: Ça permet d'écrire plus vite mais c'est aussi plus fatiguant, on s'y attendait. Au début c'est super excitant, tu peux contrôler presque toute la "chaîne de production", on a décidé de tout faire tout seul mais y'a des moments où c'est dur.  


Pour vous la scène c'est un kiffe ou vous avez la trouille?

JB: Récemment pour moi, la scène c'est vraiment devenu uniquement un moment de plaisir, et moins en moins de trouille. C'est plus tellement un truc que j'appréhende, il y a quelques dates où il y a des enjeux, mais pour nous l'enjeu va de plus en plus être dans l'écriture de la chanson. Enfin je le vois comme ça, là où je stresse c'est d'écrire la chanson ultime. Sur scène on se marre en général. 
Alex: On répète beaucoup pour être carré, carré, carré, tout le temps. Après le but 1er en concert c'est pas forcément que les gens écoutent tes chansons,  évidemment que si mais pour ça t'as le support chez toi, le plus important c'est surtout qu'ils passent un bon moment. On a tendance à ne pas jouer les acoustiques en live, ce soir par exemple on ne va pas le faire, on veut vraiment faire un set de 40 minutes où les gens vont danser, s'éclater et voilà. En général on fait des concerts le vendredi, le samedi soir, que ce soit au Bus Palladium ou à la Flèche, t'es vraiment là pour te faire plaisir mais surtout faire plaisir aux gens. Tu peux avoir -je ne devrais pas dire ça- des coupures de sons, des problèmes, si jamais tu assures, tu passes un bon moment et les gens se marrent aussi, la soirée est sauvée et en général les programmateurs sont très contents de ça. Maintenant qu'on fait quelque chose de plus électro avec ce groupe, c'est très facile sur piste, en live moins, surtout à deux, il nous faudrait beaucoup de machines, beaucoup de personnes. Donc on a un peu changé, les guitares sont différentes, il y a des voix qui ont changé, des choeurs et tout, donc c'est en plus une nouvelle expérience, c'est plus adapté à la scène. Nous on les connaît par coeur les chansons donc c'est plus marrant de les jouer différemment sur scène.  


Est-ce que vous réussissez à vivre aujourd'hui de votre musique?

JB: On a eu un ou deux mois où à ce rythme là ça serait bon. Là on est en préparation, c'est un peu bizarre à expliquer, mais on a un peu pris notre temps. Au début on ne l'a pas fait, et on a vu qu'il fallait peut-être le prendre. Le déclic ce sera 2011, s'il y en a un, pour l'instant on prend notre temps, on ne fait pas beaucoup de concerts, on écrit, on essaie d'attirer l'attention, après on verra.  
Alex: C'est aussi la différence par rapport à tous nos groupes d'avant. Auparavant, on avait tendance à faire plein de concerts, là c'est vrai que si on faisait un concert tous les soirs, partout en France, juste de quoi se défrayer et y aller, on pourrait, mais on l'a déjà fait avec nos groupes, tu joues joues joues et au final tu as deux, trois articles. Alors que là on a sorti un premier produit, on va en sortir un deuxième, on essaie de faire les choses dans l'ordre, avec des gens qui nous plaisent pour être sûr du résultat. En prenant notre temps on finit par gagner du temps. (rire général) Tu peux le mettre en caractère gras ça! Et à Paris, même quand ton groupe marche bien tu ne peux pas faire un concert par semaine, le max c'est un par mois, sinon les gens ne viennent pas, c'est à peu près ce qu'on fait maintenant.  


JB, Call Me Senor @ La Flèche D'or, le 27 novembre 2010. (copyright Anh Phi)


BEST OF

Votre meilleur concert en tant que Call me senior?
(en choeur): Bus Palladium
Votre meilleur concert en tant que spectateur? 
JB: Récemment, les Foals à Manchester, j'adore le 2ème album, ainsi que le 1er, et là être au milieu d'anglais bourrés pour un concert de rock c'est juste génial!
Alex: Moi ça remonte! Ça fait trois ans que je ne suis pas allé faire de concert à Paris. Kasabian, je les avais vus plusieurs fois, parce qu'on est vraiment fan, et je les avais vus notamment une fois à Londres, l'un des derniers concerts, ils avaient changé plein de trucs, ils avaient des choristes etc. et la 1ère partie était chanmée aussi. 
La meilleure boîte où jouer? 
Alex: L'installation sonore est pas ouf mais j'aime bien le Baron
JB: J'aimerai bien jouer chez Moune, j'aime bien les trucs petits.
La meilleure salle de concert?
Alex: Là où on rêverait de jouer? La Cigale ou l'Olympia, des salles qu'on n'a pas encore faites, qui sont déjà plus prestigieuses, mais sinon en salles où on a joué: Social Club, Point Éphémère, Flèche D'Or. La Flèche D'or la salle est belle, le son est bon, tu peux avoir un public devant. 
Le meilleur mag' musical? 
JB: Je n'en lis pas beaucoup. De temps en temps un petit NME parce que c'est marrant. Ils vont encenser un groupe pendant une semaine et après dire que c'est de la merde, ils arrivent à créer de l'excitation, chaque semaine il y a un meilleur groupe de tous les temps. Sinon Dirrty Music (clin d'oeil)!
Alex: Je lis parfois Technikart ou les Inrocks mais je ne suis jamais d'accord avec les critiques musiques.
Le meilleur groupe actuel?
Alex: Il ne faut pas que je réponde, ça fait trois jours que j'ai Kanye West dans la tête. De toute façon il n'y a que deux albums que j'écoute en entier Kanye et Foals, ah oui et I Blame Coco, ça en fait trois.
JB: le Phoenix est bien aussi, ah mais il n'est pas de cette année... Bon bah pareil avec Kasabian. Le prochain va être trop bien il paraît, complètement différent.